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Ces "varices" suscitent encore bien des gênes et des douleurs, et pourtant, elles se soignent de mieux en mieux.
Sujet souvent tu et caché, les hémorroïdes sont pourtant au départ de banals vaisseaux de la paroi
de l’anus. « Tous les êtres humains ont des veines hémorroïdaires, qui se présentent en général sous
la forme de trois paquets distincts », précise la Dre Hannah Pflieger, chirurgienne digestive et
proctologue. « Mais, chez certaines personnes, elles gonflent sous l’effet d’une constipation chronique,
d’efforts de poussée répétés ou de station assis prolongée sur les toilettes. » Les hémorroïdes peuvent être internes ou saillir hors de l’anus, sous forme de crises. Dans tous les cas, ces « varices » deviennent
gênantes, douloureuses, de petits caillots peuvent se former et saigner. Les hémorroïdes ne sont pas
contagieuses, elles ne s’infectent pas et ne dégénèrent pas en cancer, mais elles requièrent toujours une
première consultation chez un proctologue ou un gastro-entérologue, afin d’établir le diagnostic
et d’écarter une autre pathologie comme une tumeur de l’anus. En attendant, pour soulager
une crise, on peut prendre un anti-inflammatoire (ibuprofène, sauf en cas de grossesse ou autre contre indication) et demander à son pharmacien des veinotoniques, une pommade ou des suppositoires
anti-hémorroïdaires (en vente sans prescription). Ils peuvent avoir une action ponctuelle, à condition que
les hémorroïdes ne soient pas trop volumineuses.
En consultation
Si les crises sont fréquentes ou que les hémorroïdes continuent de gonfler, après un examen et un
interrogatoire, le gastro-entérologue ou proctologue vous proposera un traitement instrumental à son
cabinet. Il est en effet possible de réduire la saillie des hémorroïdes et les saignements, en posant un
élastique à la base du « paquet d’hémorroïdes », afin de le priver de sang. Cette intervention, appelée ligature élastique, se pratique sans anesthésie, mais elle peut ensuite induire une douleur pendant 24 à 48 heures. L’élastique tombera au bout de quelques jours et la plaie guérira en une à deux semaines, ce qui aura pour effet de remonter les hémorroïdes au-dessus du canal anal. S’il faut traiter un autre paquet d’hémorroïdes, le médecin effectuera le même geste un mois plus tard. « Ce traitement est cependant de moins en moins pratiqué, car il s’accompagne d’un risque de récidive d’environ 30 % à six mois, surtout si on ne traite pas la cause (constipation) », souligne la Dre Pflieger. Lorsque la gêne est essentiellement due aux saignements, on lui préférera la photocoagulation : le médecin délivre un courant infrarouge directement sur l’hémorroïde, en plusieurs impacts. Une à deux semaines plus tard, la croûte tombe et s’évacue spontanément par l’anus. En détruisant ainsi partiellement les petits vaisseaux, on limite les saignements, mais plusieurs séances à un mois d’intervalle sont nécessaires, et ce traitement n’est pas toujours efficace.
Au bloc opératoire, des techniques moins invasives
En cas de récidive, lorsque les hémorroïdes internes sont trop volumineuses (grade 2 ou 3) ou qu’elles
sortent de l’anus, la chirurgie mini-invasive permet d’en réduire le volume, sans plaie cutanée :
les hémorroïdes se rétractent en un à trois mois. D’importants progrès ont vu le jour au cours
des deux dernières décennies. Les proctologues ont maintenant le choix entre trois techniques,
réalisées au bloc opératoire sous anesthésie générale. Dans la plus ancienne, l’anopexie circulaire
(hémorroïdopexie de Longo), le chirurgien agrafe les artères qui vascularisent (nourrissent) les
hémorroïdes, mais cette intervention comporte des risques (douleurs persistantes, récidives). Plus
récente, la ligature artérielle hémorroïdaire avec Doppler (HAL-RAR Doppler) consiste à repérer les
artères hémorroïdaires à l’aide d’une sonde Doppler et à les lier, afin de réduire l’apport sanguin dans
les hémorroïdes. Le chirurgien réalise en plus une suture pour arrêter les saignements et remonter les
hémorroïdes à l’intérieur de l’anus (mucopexie). La radiofréquence (ou procédure Rafaelo), enfin, permet de détruire les paquets hémorroïdaires en chauffant à une forte température, pendant 10 à 20 secondes, sous puis sur l’hémorroïde, après l’injection d’un mélange d’anesthésique et de sérum physiologique entre le muscle et l’hémorroïde. Pour le moment, cette technique n’est cependant proposée que dans une vingtaine de centres en France. Dans tous les cas, la personne peut rentrer chez elle le soir de l’intervention, avec une prescription de bains de siège 3 fois par jour pour soulager la douleur, des laxatifs, des antalgiques, des anti-inflammatoires, environ une semaine d’arrêt de travail et 7 jours d’antibiotiques pour prévenir une éventuelle infection. Toutefois, comme les veines hémorroïdaires sont laissées en place, il existe toujours un risque de récidive. Pour le moment, le choix de la technique dépend surtout de la formation du chirurgien et de la disponibilité du matériel. La Dre Pflieger mène actuellement une étude (RADO), afin de comparer la ligature artérielle hémorroïdaire avec Doppler (HAL-RAR Doppler) et la radiofréquence, en prenant en compte différents critères : douleurs postopératoires, saignements, qualité de vie et retour au travail. Le recrutement des patients est en cours et les résultats ne seront pas connus avant 2025.
Un traitement radical
Chez les personnes qui ont aussi des hémorroïdes externes qu’on ne peut pas traiter, reste l’hémorroïdectomie. Cet acte chirurgical, réalisé au bloc opératoire sous anesthésie générale ou
rachianesthésie, consiste à retirer totalement les hémorroïdes. Plus de risque de récidive, donc ! L’intervention peut être effectuée dans la journée (en ambulatoire), mais les suites sont souvent douloureuses. La personne rentre chez elle avec une perfusion d’antalgiques pendant trois ou quatre jours et elle bénéficiera de 3 à 4 semaines d’arrêt de travail.
La meilleure prévention
La première cause d’hémorroïdes est un transit paresseux. Pour prévenir les récidives, il faut donc privilégier les aliments riches en fibres, éviter alcool, café, thé, épices, condiments (cornichons,
moutarde) et bouger davantage. En complément, des laxatifs osmotiques comme le polyéthylène glycol,
ou PEG (Transipeg®, Forlax®, Movicol®…), ou à base de sucres non absorbables (Duphalac®,
Importal®, etc.) peuvent contribuer à ramollir les selles.
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